Les peintures d'Alain Sicard, exposées pour la première fois au musée des Beaux-Arts de Rouen, présentent cette contradiction visuelle qui interpelle au premier regard : à la grande planéité du support et de la matière répond une vertigineuse profondeur créée par une infinité de couches de peinture, appliquées au pinceau puis épongées, gommées sans cesse pour former des strates successives.
Recouvrant une mince feuille de papier pelliculé avec de la peinture à l'huile très liquide, mêlée parfois à un vernis mat, il assure à ses œuvres une finition très brillante, presque photographique. La fluidité de ces mouvements tracés nous immerge dans une mise en abyme du geste pictural répété, de la jouissance de la couleur pour elle-même.
La gestation des œuvres d'Alain Sicard s'effectue à partir de réminiscences, de souvenirs des sensations éprouvées devant des tableaux vus chez ses grands-parents ou dans les musées. Un fonds d'images préparatoires, couvertures de livres d'art et cartes postales, accumulées depuis des années, provoque chez lui l'impulsion créatrice. Ses œuvres réactivent ainsi chez celui qui les regarde un sentiment familier, l'essence des émotions esthétiques vécues précédemment devant d'autres peintures.
À la monographie d'artiste exposant les œuvres dans un espace clos, retranchées de toute histoire de l'art, se substituent dans l'accrochage des peintures d'Alain Sicard au musée des Beaux-Arts un dialogue avec les collections permanentes et une réflexion globale sur le musée.
Alain Sicard est représenté par la Galerie Bernard Jordan – Paris/Zurich.