Ce plâtre, daté en bas à droite de 1822, est le modèle original de la statue du général vendéen Bonchamps pour le monument dressé en son honneur à l’église de Saint-Florent-le-Vieil sur les bords de la Loire, près d’Angers. C’est là qu’il meurt en 1793, non sans avoir demandé « Grâce aux prisonniers » républicains de son armée (citation reprise sur le bord du plâtre). En 1817, une souscription est ouverte pour la réalisation du monument dont la statue du général doit être la pièce maîtresse. David d’Angers était particulièrement motivé pour en être l’auteur car son père — républicain — avait précisément fait partie des 5 000 prisonniers graciés par Bonchamps.
David s’inscrit ici dans la lignée du néoclassicisme. Il est parmi les premiers à tirer la leçon du fronton du Parthénon d’Athènes, vu à Londres en 1815 : la pose générale du personnage rappelle celle du dieu-fleuve Illyssos. Et on retrouve la ligne de séparation de l’abdomen chère à Phidias. Ce corps magnifié dégage une impression de puissance souveraine qui acquiert une portée morale. David y ajoute une expressivité personnelle qui fraye avec le romantisme : la crispation du visage asymétrique, aux boucles défaites et à la bouche ouverte, a une humanité poignante.
Par cette héroïsation frappante d’une figure présentée seule et nue, dans une attitude décisive avec un geste au sens clair, David atteint ici au rôle de « Plutarque sculpteur » dont il rêve.