Gustave Caillebotte
(1848 - 1894) | D.946.1
Date : 1880 | Technique : Huile sur toile
C’est à la cinquième exposition impressionniste que Caillebotte a présenté cette scène de café, peinture de la vie moderne. Un personnage masculin y domine, grandeur nature. C’est un modèle plusieurs fois peint, ici en vêtements flasques, un peu débraillé, mains dans les poches, regard vague. Avec son air désabusé, il se plante là comme un pilier de brasserie, coupé de son entourage, le chapeau melon d’un autre âge vissé à l’arrière de la tête, qu’il n’a pas pris le soin d’ôter. Un jeu de miroirs montre en arrière plan — mais devant lui — deux chapeaux accrochés à une barre — dont un haut de forme — , et deux hommes en train de jouer aux cartes ou aux dominos, univers exclusivement masculin. La scène a lieu dans un bel établissement sur les grands boulevards parisiens, vers midi, comme l’indiquent, dans le miroir, le feuillage ensoleillé et le store rouge et blanc. La table voisine de notre homme porte quatre soucoupes de faïence devant un verre à absinthe, que montre également un dessin préparatoire à l’œuvre (New Haven, Yale University Art Gallery). Aussi a-t-on pu voir dans cette peinture un manifeste contre la libéralisation des débits de boisson décidé par la loi du 17 juillet 1880, quand l’absinthe étendait ses ravages… Elle n’est pas moins un manifeste impressionniste, dont le sujet, la touche vibrante, la lumière claire, agissant sur les matières qu’elle pénètre, les jeux de reflets simultanés rappellent le propos de Caillebotte : « Et puisque nous accolons étroitement la nature, nous ne séparons plus le personnage du fond d’appartement ni du fond de rue … »