Joseph-Michel Pollet
(1814 - 1870) | D.868.3
Date : 1862 | Technique : Bronze
« Je t’aime et je descends. Mais que diront les cieux / (…) / Deux fois encore levant sa paupière infidèle, / Promenant des regards encore irrésolus, / Elle chercha ses cieux qu’elles ne voyaient plus. / (…); J’ai cru t’avoir sauvé – Non, c’est moi qui t’entraîne » ».
Ces vers d’Alfred de Vigny écrit en 1823 font parti du poème Eloa ou la Sœur des Anges qui a inspiré Joseph-Michel Pollet pour cette sculpture en bronze datée de 1862. Eloa, ange de la compassion, née des larmes du Christ versées à la mort de son ami Lazare, est séduite par Satan qui l’attire par ses propres larmes. Il l’enlève enfin se révélant comme l’ange déchu et inconsolable. Le sujet est romantique, le style également. Le corps contorsionné d’Eloa montre celle-ci déjà soumise – assise sur les genoux de Lucifer – mais encore dans l’attitude de l’humble servante en prière, la tête détournée de Satan et regardant vers le ciel. Le moment est donc dramatique, c’est celui où Eloa quitte tout espoir et toute attache au ciel, emportée malgré elle vers le monde des ténèbres. L’émotion est accentuée par l’opposition totale entre les deux visages : celui de l’ange déchu, résolu et sombre, est tourné vers le bas, les cheveux au vent montrant que le couple tombe déjà tandis que celui d’Eloa est tendu vers le ciel, le regard seul encore relié vers le ciel. Mais tout espoir semble bien perdu : Satan enveloppe déjà l’ange de la compassion, l’agrippant de ses deux mains et l’entourant de son aile. Pourtant une impression de calme se dégage du rendu idéalisé de ces corps sveltes et gracieux et de ces visages juvéniles. Il s’en dégage un parfum d’éternité qui inciterait à voir dans ce groupe plus qu’une simple scène tirée d’un poème, peut-être l’allégorie de l’Innocence emportée par l’Orgueil.