Jacques Lipchitz
(1891 - 1973) | 988.9.1
Date : 1920 | Technique : Bronze, tirage d’artiste
Dans ses souvenirs, Lipchitz présente ce buste fait en 1920 comme le gage d’amitié d’un artiste à un autre. Il représente Raymond Radiguet, dont c’est sans doute le premier portrait connu. Jean Cocteau lui aurait amené le jeune poète en lui suggérant de faire son portrait. Radiguet avait alors dix-sept ans, il venait de fonder avec son ami la revue Coq et travaillait au Diable au corps dont il lisait des pages pendant les séances de pose.
Dans sa série de portraits de 1920-1922 – de Raymond Radiguet, Jean Cocteau, Gertrude Stein et Lulla, sa femme –, Lipchitz s’éloigne de sa recherche de déconstruction des motifs en plans multipliés imbriqués dans le sillage des avant-gardes constructiviste et cubiste, et s’interdit toute déformation, tout en rénovant l’esthétique ancienne du portrait. Tous les traits deviennent figures de style dans une recherche d’épure du visage.
À propos du portrait de Rouen, l’artiste écrit : « Le jeune homme avait une ossature extrêmement belle et des traits nets et précis que j’accentuai. Pour cela, je contins la masse de la chevelure dans le plâtre et l’éliminai même dans le bronze. Par rapport aux portraits faits avant la guerre, celui-ci peut sembler plus réaliste par sa précision et le modelage de l’intérieur de la pupille des yeux. Pour moi, cependant, c’est encore un travail extrêmement classique qui a les caractères d’idéalisation et de repos qu’on trouve dans la sculpture grecque ancienne ».
Cette esthétique rappelle justement celle de Radiguet en littérature à la même époque, celle que décrit Cocteau quand il parle de « cette méthode d’une nouveauté étonnante qui consistait à ne pas avoir l’air original ».